Diego Velázquez, le peintre des peintres
C'est un bel hidalgo un peu sévère, énigmatique, qui nous regarde fièrement dans l'un de ses rares autoportraits. Il arbore la clé d'argent, symbole de son statut d'« auxiliaire de la Chambre » (ayuda de cámara), mais pas encore la croix rouge de Santiago, l'ordre dont il deviendra chevalier. Rien ne rappelle ici son métier de peintre, qui pourtant l'a rendu célèbre.
Le peu d'informations dont on dispose à son égard semble plaider en sa faveur. On sait qu'il est issu de la petite noblesse sévillane et qu'il est né en 1599 : brillant élève et apprenti peintre exceptionnellement doué, il obtient le droit d'exercer son métier à dix-sept ans. Il épouse Juana, la fille de son maître Pacheco, deux ans plus tard : il semble un jeune homme pressé, et ambitieux.
Conscient de son talent, il tente sa chance à la Cour, installée à Madrid : il est nommé peintre du Roi, en qualité de portraitiste, en 1623. On y vante ses « excellentes dispositions », la qualité de son travail, son « air et son comportement de gentilhomme, sa grâce naturelle et sa prestance ». C'est un homme de goût, dont la mise est à la fois soignée et originale.
C'est aussi un ami fidèle, qui soutient le peintre Alonso Cano et fait venir à Madrid Francisco Zurbarán, mais jalousé par l'arrière-garde des vieux peintres de la Cour. Qu'importe : le Roi lui-même l'apprécie et lui apporte sa confiance. Un autre personnage important joue auprès de lui un rôle considérable : le peintre flamand Pierre Paul Rubens, envoyé à la Cour d'Espagne en mission diplomatique. Il prend le jeune artiste espagnol sous son aile, et exerce sur lui une profonde influence, intellectuelle et picturale.
Velázquez se plaint parfois des difficultés à se faire payer pour ses tableaux, et se montre soucieux de son ascension sociale. Il ne se doute pas qu'un jour, deux siècles après sa mort en 1660, on le surnommera le « peintre des peintres ».
Sylvie Blin
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