Miró dans les moindres détails !

25 octobre 2018
Autour des années 1920, Miró partage son temps entre Paris et Mont-roig, en Espagne. Il développe un nouveau style pictural à travers ses paysages, d'une minutie extrême !

Recherchant avec ferveur cet « absolu de la nature » Miró entend livrer sa « vision extatique » du microcosme que forme la ferme familiale de Mont-roig. Il s’éloigne du fauvisme pour privilégier une écriture plus fine capable de révéler les éléments les plus infimes en leur donnant vie (insectes, fleurs, brindilles). Il peint les objets du quotidien les plus humbles et les animaux en les détaillant minutieusement, tel un miniaturiste. Sa résistance au provincialisme étriqué le pousse à s’isoler de la scène barcelonaise, et fuir, en gagnant Paris. Son premier séjour dans la capitale en 1920 est un coup de poing : « Décidément, plus jamais Barcelone. Paris et la campagne et cela jusqu’à ma mort », écrit-il à son ami Enric Cristófol Ricart.

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La Ferme 1921-1922 huile sur toile 123,8 x 141,3 cm États-Unis, Washington, National Gallery of Art don de Mary Hemingway, 1987  © Successió Miró / Adagp, Paris, 2018

De retour à Mont-roig le 25 juillet 1921, Miró commence La Ferme (ci-contre) et Paysage catalan, deux oeuvres qui vont l’accaparer jusqu’à l’hiver et lui font pressentir l’importance et la difficulté de la transmutation qu’il veut élaborer à partir du réel. Œuvre de synthèse, La Ferme est avant tout un acte de fidélité envers le lieu où il a fait son apprentissage de l’art et de la vie, au plus près de la nature. Avec une tendresse infinie, Miró se penche une dernière fois sur les êtres et les objets qui ont peuplé son enfance.

Jacques Dupin rapporte que, pour continuer son tableau à Paris, Miró emporta dans sa valise de l’herbe de Mont-roig, « comme un symbole concret, un talisman ». Peints après des études sur le motif très poussées, figures et objets, fermement stylisés, sont isolés de manière à ce que l’on puisse contempler chacun d’eux dans son individualité et ses qualités propres.

de%CC%81tail_Miro_ferme.pngOn dénote également l’intérêt que Miró porte à la matière et à la texture des objets, ainsi qu’en témoigne le traitement du mur de la ferme, où les craquelures et les lézardes ont été traduites par un jeu subtil de lignes sinueuses, de traits courts et de points.

Chef-d’oeuvre de la période «détailliste» entreprise par Miró en 1918, La Ferme fut acquise, après maintes péripéties, par Ernest Hemingway, qui écrira à son sujet : «Il y a là-dedans tout ce que vous sentez de l’Espagne quand vous y êtes et aussi tout ce que vous sentez quand vous n’y êtes pas, et que vous ne pouvez pas y aller. Personne d’autre n’a été capable de peindre ces deux choses très différentes.»

Retrouvez cette oeuvre et sa période "détailliste" au Grand Palais jusqu'au 4 février 2019 ! 

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